Le bonheur ordinaire de la tarte aux pommes

Elle est si ordinaire, la tarte aux pommes, que je l’avais oubliée au profit des crumbles, des crêpes ou du riz au lait. Desserts de l’hiver dont la rondeur des odeurs réconforte, parfumant l’enfance de souvenirs gourmands. En achetant ma baguette, elles sont pourtant là, les tartes aux pommes, alignées dans la vitrine, rondes et brillantes dans l’éclat des lumières artificielles.

Les minces lamelles de fruits déposées en rosaces élégantes sur des cercles de pâte fine et croustillante. Elles sont si délicates, ces jolies tartes, qu’on a de le peine de les dévorer en seulement quelques minutes. Ma brochette de gourmands n’en ferait qu’une bouchée.

De retour à la maison, je choisis donc la version famille nombreuse, plus rustique et copieuse. Je prépare une grosse boule de pâte brisée. Une pâte simple et rapide qui accueille aussi bien du sucré que du salé. Je l’étale sur le lèche-frite du four en remontant un peu sur les bords. Puis je recouvre toute la surface de pommes coupées finement. Enfin plus ou moins. Je n’ai pas la patience et le savoir-faire du pâtissier.

Puis je mélange des œufs, de la crème, du lait, du sucre et de la vanille. Les proportions sont approximatives. La tarte aux pommes, c’est comme le vélo. Une fois qu’on a appris, on n’oublie pas. Je coule la garniture entre les rangées de fruit et enfourne le grand plateau pour quarante minutes.

La maison embaume rapidement. Églantine passe une tête dans la cuisine, découvre le temps de cuisson restant et décide de redescendre de sa sieste quand ce sera prêt. Hortense rentre plus tôt du collège. La prof de latin est absente. Ainsi, nous sommes réunies à l’heure du goûter. Les parts sont généreuses, la tarte moelleuse et les papilles joyeuses.

Elle est si ordinaire, la tarte aux pommes, qu’on oublie parfois le plaisir élémentaire d’en déguster une. S’assoir ensemble autour de la table, se raconter les anecdotes de la journée, les joies familières et les petits tracas. Elle invite à sourire, la tarte aux pommes. Elle détend les cœurs serrés et assouplit les esprits tortueux. Avec elle, la vie semble plus douce. Un très bon remède à l’hiver morne et monotone.

La version XXL du lèche-frite étire la gourmandise jusqu’au petit-déjeuner. Volupté ensoleillée d’un début de journée grisâtre. Quel bonheur cette tarte aux pommes !

L’eau qui dort

La Charente serpente entre les pierres blanches de ses vieilles cités, petits villages et abbayes romanes. Les saules pleurent leurs branches dans l’eau claire qui file doucement. Des poissons rasent la surface à la recherche de nourriture. Les libellules virevoltent le long des berges dans des éclats bleus ou verts. Un kayak aux couleurs vives est posé sur un banc de gravier au milieu du fleuve. On entend des éclats de rire derrière les arbres de la berge. Quatre adolescents s’amusent et se chicanent à grands renforts de jets d’eau fraîche.

Je m’accorde une dernière pause avant de rejoindre maman. Toujours se méfier de l’eau qui dort.

Ce sera ma photo du lundi cette semaine. Une bouffée d’oxygène, un oasis de quiétude avant d’affronter le grand tourbillon.

Comment apprivoiser un chat

Plutôt pas mal cette petite journée de vacances en rab avant la reprise. Pour Hortense, ça a été l’occasion de terminer ses devoirs. Et de se rendre compte que, si je la houspille aussi souvent pour qu’elle se mette au travail régulièrement, c’est que nous souffrons, elle et moi, du même travers : une forte propension à la procrastination. Cet art subtil de repousser à plus tard.

Dans notre imaginaire, le temps s’étire à l’infini, accueillant sans réserve tous nos projets, toutes nos envies et toutes nos obligations. Il sera donc toujours temps de faire ça plus tard, se dit-on in petto face aux contraintes. Mais les dates limites dressent invariablement leurs herses acérées dans le moelleux de nos rêves d’infini, provoquant boules d’angoisse et sueurs froides.

Hortense a eu par le passé quelques rentrées difficiles, réalisant la veille au soir qu’un devoir n’était pas fait ou une leçon non apprise. Une fois, ce fût le matin même qu’elle réalisa qu’elle avait une évaluation qu’elle n’avait pas préparée.
Alors, je m’assoie avec elle autour de la grande table de la salle à manger. Je la laisse travailler à son rythme. Je suis disponible si elle a besoin de moi mais je lis ou écris de mon côté sans la déranger. Je lui demande juste si elle est certaine de ne rien avoir oublié.

Aujourd’hui, elle m’a avoué, après avoir terminé ses devoirs, qu’un poids venait de la quitter. Je voyais très bien ce dont elle parlait. Elle s’est serrée contre moi, rassurée de ne pas être seule à connaître cette culpabilité de la procrastination.

J’ai profité de ce moment de proximité pour relancer le sujet de la lecture. Hortense a toujours son caractère de chat à qui il ne sert à rien d’imposer quelque chose. J’aimerais qu’elle lise autre chose que ses mangas et ses webtoons. Qu’elle s’intéresse un peu au monde qui l’entoure. Alors, j’ai allumé mon ipad et affiché le dernier numéro de Topo. J’ai l’habitude d’acheter ce magazine chez le libraire et plusieurs anciens numéros traînent à la maison. Il traite de sujets d’actualité et de société très divers sous forme de bandes dessinées et se destine aux moins de 20 ans (mais on ne meurt pas instantanément si on le consulte après cet âge).

Je sais qu’Eglantine le lit avec plaisir mais Hortense m’a confirmé qu’elle ne le feuilletait jamais.

J’ai entamé un article sur le Qatar. Hortense n’était pas intéressée. Puis j’ai senti son regard se poser sur les dessins et les textes. Petit à petit, elle s’est plongée avec moi dans le reportage. Il faut reconnaître que le format BD de ce magazine est vraiment propice à la lecture.

Finalement, après le dîner, elle a terminé seule la lecture de l’article sur le Qatar et lu le sujet suivant dans la foulée.

Que ces instants sont précieux, ceux où l’on sent que la patience porte ses fruits, que bienveillance et compréhension apportent plus qu’obligations et contraintes. Et où l’armure de l’adolescente en pleine affirmation de soi laisse passer tendresse et complicité. De l’art d’apprivoiser un chat.

Ca rubikscube !

Petit chat a ressorti les Rubik’s Cubes. Avec son papa, elle a exploré les tutos sur le web. A la fin de journée d’hier, elle était capable de résoudre le 2×2. Quand nous sommes revenus de notre sortie au théâtre, elle n’attendait qu’une chose, que nous mélangions son petit cube coloré.

Après le déjeuner, ce dimanche, les filles ont troqué leurs savoir-faire. Je te montre comment résoudre le Pyramix (ce Rubik’s Cube en forme de pyramide) et tu m’apprends le 2×2. Petit Oiseau a dû faire preuve de patience car sa sœur n’aime pas du tout ne pas réussir du premier coup.

Alors, tête contre tête, l’une allongée sur le canapé, le chat sur les genoux, l’autre lovée dans le fauteuil qu’elle avait rapproché au plus près de sa sœur, elles ont fait tourner les faces aux couleurs vives. Cris de frustration, rires bienveillants, ça charriait un peu, et ça recommençait. Sororité complice. Connivence de casse-tête.

Prochaine étape pour tout le monde, le 3×3. Leur père s’est déjà entraîné.

Retour de camp

Retour de camp après le Jamboree des Scouts et de Guides de France à Jambville. Connecte 2019.

Retour de campFin de canicule. Fin de camp. Jamboree. 22000 chemises bleues, une forêt de tentes et une ambiance de festival. Petit Oiseau était à Connecte 2019 avec sa tribu.

Donc elle va mieux.

Suffisamment pour partir deux semaines en camp scout. Tant que les chefs ne m’appellent pas, c’est que ça va. Un petit malaise en première semaine. Sac à dos trop lourd pendant l’exploration. Après des mois au fond de son lit, elle n’a pas encore récupéré toutes ses capacités.

Puis c’est la grande réunion des scouts et des guides, ces jeunes de 11 à 14 ans venus de toute la France et d’au-delà. Avec un pic à 42°, je redoutais pour l’organisme de celle qui, malgré tout, reste mon bébé. Et puis, finalement, nous n’avons encore aucun diagnostic précis de ce qu’elle a eu. Je crains toujours une rechute.

Pas de nouvelles. Pas une lettre. Elle n’y pense jamais de toute façon, trop occupée à vivre ses aventures en chemise et foulard, feu de camp et chaussures de rando. Difficile quand même d’accepter que, moins d’un mois après l’amélioration de son état, elle va mettre son corps à rude épreuve, dormir sous la tente, cuisiner sur une table à feu, manger dans des gamelles en fer, se doucher à l’eau froide.

Pour elle, c’est un retour à la vie.

Pour moi, c’est un changement violent de température. De maman soignante à maman derrière son écran, à l’affût d’un Petit Oiseau avec un grand sourire et deux nattes sur les vidéos mises en ligne par la Toile Scoute sur YouTube.

Journal de 13h, journal de 20h, TF1 parle des scouts. Sur Facebook, vue aérienne d’une veillée hors norme. C’est quel point bleu mon Petit Oiseau ?Vue aérienne Connecté 2019. Crédit Thierry Braun.

Photo de Thierry Braun. Cliquez pour voir l’originale.

Alors ce vendredi, je suis assise au soleil sur la dalle du RER. J’ai de quoi lire mais je reste concentrée sur les portes en verre de la gare. Soudain, une première chemise bleue. C’est une cheftaine. Puis, tout de suite, c’est mon Petit Oiseau avec son gros sac à dos qui dépasse au-dessus de sa tête.

J’ai mon appareil photo. Je la mitraille. Ce sourire-là est unique, encore chargé de la force du groupe, de la magie de ces moments passés avec tant d’autres jeunes, de la joie de vivre des moments d’exception. Ensuite, il s’étiolera, gagné par la fatigue, vidé par les récits, rattrapé par le présent et les projets futurs.

Elle rayonne. C’est un sourire à pleines dents, bonheur à l’état brut, diamant émotionnel.

Un câlin, l’odeur de camp et de feu de bois. Elle parle vite. Elle déverse d’un coup le sac de ses souvenirs. Derniers mots avec les copines, avec les chefs. On s’éternise au local. Quitter la tribu, c’est accepter que ce moment est terminé, que le Jamboree a été, qu’il ne vivra désormais que dans son cœur, ses récits et les souvenirs qu’elle évoquera certainement longtemps avec ses amies.

Son foulard est posé sur la table, sa chemise sur le canapé. Elle a de nouveaux écussons et quelques badges. A la rentrée, elle aura tout cousu sur sa nouvelle chemise rouge. Elle entrera dans la caravane des grands. Tout un programme, encore plus d’autonomie et tant de nouveaux projets.

Retour de Camp. Connecte 2019. Chemise et foulard

Pour le moment elle dort, bienheureuse de retrouver le confort d’un lit moelleux et sans bosses. Petit passage aux urgences en début de soirée, quand même, pour faire retirer cinq tiques tellement petites que je n’arrivais pas à les enlever avec le tire-tique. Mais elle va bien.

Elle grandit et la voir s’épanouir est le plus précieux des cadeaux.

Le tee-shirt doudou et le gâteau

Je me réveille. Il fait encore nuit. Je suis en forme. Quelle heure est-il ? J’allume mon portable. 4h50. Aouch. C’est mort pour me rendormir. Je pourrais jouer au solitaire sur mon écran en basse luminosité, dans la chaleur confortable du lit. Et me bousiller les yeux dès le matin, avec mal de crâne assuré dès 10h.

Je pourrais descendre et m’allonger dans le canapé confortable, une couverture sur les pieds, un livre dans les mains. Mais j’ai peur d’avoir ensuite du mal à sortir de ma lecture quand viendra l’heure de se lever pour de bon.

Je descends encore d’un cran et me faufile à travers la maison jusqu’au sous-sol. Un monstrueux tas de vêtements occupe tout le petit canapé. J’ai vidé machine sur machine, sans même prendre le temps de mettre les vêtements à plat. Ça fait du volume.

Arg la charge mentale ! Je me lève à 5h du mat’, et j’atterris devant ma table à repasser ?!

Oui, mais non. Parce que je me mets un podcast. En l’occurrence, ce matin, je me suis régalée avec Popopop d’Antoine de Caunes. Je ne connaissais pas. Je me suis abonnée.

Parce que le repassage, c’est chiant. Soyons claires. Et un peu vulgaire au passage. Oui. Mais c’est parce que vraiment, le repassage, je déteste. J’en connais qui font ça tranquillou en regardant la télé. Moi je ne peux qu’avec des séries débiles. Sinon, suivre un film en ne faisant pas un pli, je n’y arrive pas.

Mais en ce moment, j’ai pas envie de séries débiles. Et puis le wifi ne capte pas très bien dans le sous-sol, alors ça coupe tout le temps. Frustrant.

Mais le wifi, il capte assez pour les podcasts. Du coup, quand je repasse, je me cultive. C’est beau comme une plante qui pousse non ? Ou l’art de mettre du rêve dans le quotidien.

Alors, quand je tombe sur un vieux tee-shirt d’une équipe universitaire de 94 (waow, le siècle dernier !), tout élimé et troué, mais qui revient inlassablement dans les lessives, j’ai un coup de tendritude (une sorte de tendresse attitude).

Ce tee-shirt, je le connais depuis que je connais mon homme. Il en a quelques-uns comme ça. De l’époque où il n’avait pas les chevilles usées et le dos en compote, quand il jouait encore au volley du haut de son mètre quatre-vingt-treize.

J’ai essayé plusieurs fois de les jeter au cours de nos pérégrinations à travers le monde. Puis j’ai compris. Ce sont des tee-shirts doudous. De ces petites choses qui font du bien. Et qu’on garde à travers le temps et l’érosion du quotidien.

Ces tee-shirts, c’est la douce nostalgie d’un autre temps. Un bout de jeunesse. Presque d’enfance. Comme ce gâteau que mon cher Grand Arbre dispute à ses filles au petit déjeuner. Ça tombe bien, ce matin j’ai le temps (de l’art de tomber du lit). J’en refais un vite fait, pour le goûter des filles. Et pour ce petit plaisir gourmand ce soir, quand mon homme rentrera à la maison.

Quoi la charge mentale ? Notre couple est clairement déséquilibré sur les tâches ménagères. Certes. Mais franchement complémentaire au final. Et ça, c’est plus précieux que les chaussettes sales et les vieux tee-shirts.

C’est la couplitude 😉

Repos

Repos. Tel a été le mot d’ordre du weekend. Pas de course contre la montre pour enchaîner les activités. Pas de soirée, pas de nocturne. Juste un déjeuner chez des amis, un dimanche avec vue sur les toits de Paris, le ciel gris et la pluie. Le regard qui se perd dans le lointain quand soudain la discussion reprend son souffle, traîne dans les pensées de chacun, puis se ranime, se ravive, croisant à nouveaux ses feux d’un bout à l’autre de la table, dans la quiétude chaleureuse d’un appartement parisien.

Dans la chaleur de la maison de famille

En ce premier dimanche de janvier les trois frères étaient réunis autour de leur mère, dans la maison de leur enfance. Ce n’est pas si commun et, pourtant, franchement agréable. D’autant que ces réunions de famille sont aussi l’occasion de réunir les petits cousins.

Il manquait bien, cependant, leur sœur qui vit en Autriche avec son mari et leur fille. Mais déjà, la famille réunie sur trois générations présentait un spectacle touchant.

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Dans le salon rouge baigné de la lumière de la grande verrière, les enfants ont écouté Chantoune conter l’histoire de ces savants venus à la rencontre de Jésus. Devenus rois mages et fêtés à grandes bouchées de galettes, ils ont été le prétexte à nous offrir quelques cadeaux. D’autant que nous avions passé les fêtes chacun séparément.

Cette journée termine tout en chaleur et tendresse les vacances scolaires. Les devoirs sont faits. Les cartables sont prêts. Demain, c’est la rentrée !

Fin d’année en famille

Cupcakes, brochettes sucré-salé, et autres petits plaisirs. Un 31 décembre tous ensemble.

Petites mains chapardeuses ou hésitantes, plan de travail enfariné. Les filles se mettent en cuisine dès l’après-midi.

Hortense se lance seule la première pour ses cupcakes. Elle grimpe sur les meubles pour attraper ce qui lui manque. Elle pèse, verse, mélange. Préfère le fouet au robot. Goûte avec application, et gourmandise. Et nous offre un goûter fondant.

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Eglantine s’attaque au salé. Elle découpe l’agneau et enfile les brochettes. Un morceau de viande, un morceau de mangue. Puis un autre morceau de mangue pour elle. Parce que c’est trop bon, s’excuse-t-elle, se pourléchant d’un air angélique.

Quand arrive le temps du réveillon, nous avons respecté notre dimanche cuisine et repos, gardant les jeux, les perruques colorées et notre énergie pour ce soir. Rires, danse et explosion de canons à confettis. Pluie d’étoiles d’or et d’argent voletant partout dans le salon quand sonne minuit.

Olivier me fait tourner. Les filles sont épatées. Elles gloussent en s’emmêlant les bras pour tenter de danser comme papa.

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Elles s’écroulent finalement dans leurs lits.

Ça y est, nous sommes en 2018. Bonne année !

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