Poésie de l’instant capturé

Le soleil a rempli les longues allées du parc de Sceaux. Les graviers crissent sous les roues des vélos. Les tout-petits se dandinent sur les pelouses, genoux boueux, sourires fiers des grands explorateurs. On a installé un filet de volley en haut d’une prairie. Un couple de canard brise les vaguelettes du Grand Canal. Les couvertures de pique-nique fleurissent dans l’herbe baignée de lumière, écrasant les premières pâquerettes.

Les pulls sont noués autour de la taille. Les manteaux sous le bras. Les conversations sucrées des jeunes amoureux s’évaporent dans le moelleux de leurs pas tranquilles. Les tee-shirts fluos des coureurs tranchent la nonchalance bienheureuse des promeneurs insouciants. Assis sur son tabouret, un pêcheur lance sa ligne. Les bancs de pierre se réchauffent dans le bouillonnement des bavardages. Le pas mal assuré sur le bois noueux de sa canne, la casquette protégeant ses rares cheveux, le ventre rond sous un pull bordeaux, pantalon de velours impeccable et parka bleu marine, un vieux monsieur termine sa promenade solitaire.

Corneilles noires, perruches vertes, mésanges furtives et autres passereaux égayent les frondaisons dénudées. Un âne au poil épais se prélasse dans les derniers rayons de soleil. Une poignée de moutons chargés de grosse laine broute paisiblement sous l’œil contemplatif des promeneurs.

Une pie s’envole devant moi, traverse en rase-motte l’alignement des platanes avant de se poser sous les larges branches d’un cèdre immense. Pas le temps de régler l’appareil, je vise l’oiseau et déclenche une rafale. Le flou de ma capture a des airs de peinture, donnant de la douceur au mouvement et de la poésie à l’instant.

J’ai ressorti mon gros reflex et retrouvé le plaisir léger de la photo.

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