Duel d’échecs père-fille, entre stratégie et tendresse, dans la nuit qui s’installe.
Ils se sont installés face-à-face. Hortense assise en tailleur sur le tapis. Olivier, grand sage sur son fauteuil. Entre eux, le plateau en bois, douces couleurs ambrés du damier, toutes les pièces alignées en ordre de bataille. Les changements de rythmes se sont succédé, battements rapides des coups qui s’enchaînent, longues pauses épaississant le silence. Les regards aimantés par le jeu. Quelques coups d’œil éclairs vers le visage de l’adversaire. Sonder les profondeurs de l’esprit. Affûter sa stratégie.
Entre fatigue du voyage, rires d’ado et valises à vider, souvenirs enneigés et clap de fin pour la vacances.
Une derrière matinée sur les pistes. Déjeuner en station. Laisser partir le plus gros des voitures. Puis rejoindre la grande transhumance de la fin des vacances quand la circulation est plus fluide. Ils sont arrivés dans la nuit.
Ce matin, le soleil illumine depuis longtemps les branches encore glabres de l’arbre de Judée et le vert mat du grand cèdre. La toux épaisse d’Eglantine scande l’engourdissement d’une matinée aux allures de lendemain de fête.
En descendant de voiture hier soir, chacun, chacune, portait sa fatigue à sa façon. Oliver avait les traits tirés de celui qui s’est concentré sur la route de trop longues heures. Mais il suffisait de lui parler de sa journée de ski de vendredi pour voir son visage s’illuminer.
Les cousines, cuvée 2009, riaient comme deux ivrognes. Saoules de fatigue, la tête encore dans les fous rires de leurs fantaisies adolescentes. Leurs souvenirs ont les couleurs du Club ado, berceau d’une émancipation encadrée, écho de journées de ski avec des copines et des copains du même âge.
Le visage d’Eglantine était défait par la fatigue de la route et la maladie qui la martèle depuis dix jours, alternant coups de semonce et répits salutaires. Ni grippe, ni covid, elle s’était testée avant de partir. Elle a quand même profité de la neige, heureuse ensuite de retrouver son nid perché dans la mezzanine de leur chambre. Elle s’est glissée dans la chaleur familière de son lit sitôt arrivée à la maison.
Pour moi, fini la vie de célibataire à partager des apéros, des expos et des restaus avec les copines. Me coucher tard, me lever tôt pour mon nouveau boulot. Je n’étais pas tellement plus fraîche qu’eux.
Le papa de Mélissa est venu séparer le doublon complice des cousines. Terminer de vider les valises. Première lessive. Dernières confidences. Nos fatigues se sont enlacées. Derniers baisers. Derniers câlins. Et la nuit qui accueille les rêves encore blanchis de neige.
Une interview originale, dans un lieu inattendu avec une star de Youtube. Le bonheur, c’est parfois simple comme des chiottes à la fac.
Églantine nous appelle rarement dans la semaine. Prise par ses cours qui la passionnent. Ses amis avec qui elle partage une résidence sur le campus. Et sa fatigue qui suffoque encore son quotidien. Un jour de janvier, sa voix était pleine de joie quand elle m’a téléphoné. Elle venait d’être interviewée dans les toilettes de la fac avec Julien Bobroff.
Dis comme ça, bien sûr, ça surprend un peu.
Que faisait-elle au petit coin avec une équipe de télé ? Et puis, c’est qui ce Julien ?
Chez nous, Julien Bobroff est une vraie star. Pas que chez nous en réalité puisque qu’il y a pas loin de 150 000 personnes abonnées à la chaîne Youtube de ce prof de physique (@Julien_Bobroff). Dont Olivier, depuis des années. Et Églantine depuis presque aussi longtemps.
Cet enseignant-chercheur rattaché à la fac d’Églantine est un brillant vulgarisateur. Il est capable de capter l’attention de parfaits néophytes sur des sujets hautement scientifiques. Avec lui, tout le monde peut s’attaquer à la physique quantique – en s’accrochant un peu, la pente est quand même raide.
Mais quel rapport avec les gogues de l’université ?
Ben la physique, justement. A travers une idée décalée. Trouvée à force de chercher le meilleur endroit pour diffuser de la science. Un endroit où on a du temps et rien d’autre à regarder qu’une porte ou un mur. Des toilettes.
Avec son équipe de vulgarisation La physique autrement, Julien Bobroff a imaginé l’expo scientifique la plus improbable.
« Le pari fou de ce projet, c’est de transformer des toilettes en salles d’expo pour vulgariser les sciences. Vous êtes dans une fac, un lycée, un musée ? Vous avez accès aux toilettes ? Imprimez les affiches, scotchez-les, et le tour est joué. Vous pouvez être sûr.es que les visiteur.euses seront au rendez-vous, avec l’effet de surprise garanti ! »
Ce jour-là, TF1 est venu filmer Julien Bobroff dans les toilettes des salles de cours d’Églantine. Curieuse comme une pie, elle a passé une tête, s’est retrouvée embarquée dans l’interview, était trop heureuse de parler d’un projet qu’elle trouve génial. J’attendais de voir la vidéo apparaître quelque part pour la partager ici. Mais je ne l’ai pas trouvée.
Il faudra vous contenter d’imaginer les yeux brillants, le sourire rayonnant et les paroles qui se bousculent allègrement quand Églantine raconte son aventure chiotissime.
Peau d’homme au Théâtre Montparnasse avec Laure Calamy. Un voyage entre rires et réflexions sur l’identité, la sexualité, les injonctions de la société et l’amour.
Le temps est presque trop beau pour s’enfermer dans un théâtre en cet après-midi dominical. Mon vélo roule joyeusement jusqu’au théâtre du Montparnasse. Les terrasses bruissent de murmures ravis et de rires libérés un instant de la chape de grisaille permanente. Je glisse tant bien que mal ma fidèle monture entre deux arceaux trop serrés – les concepteurs de parking vélo pensent largeur des roues et oublient le guidon, les pédales et les éventuelles sacoches. Mais c’est un autre sujet.
La rue de la Gaîté porte bien son nom. Sous la corniche richement décorée, les trois baies vitrées et les deux cariatides aux seins nus de la façade du théâtre, le nom de l’actrice parade en lettres lumineuses. Laure Calamy. Elle est la tête d’affiche de la pièce de Léna Breban, Peau d’homme.
Alors que ma petite famille dévale les pentes enneigées, je me suis offert un plaisir théâtral solitaire. Fauteuil d’orchestre dans une mer de velours rouge, stucs dorés et balcons voluptueux. Veuillez éteindre vos téléphones portables. La salle est plongée dans l’obscurité.
La salle se remplit tranquillement. Plus un siège vide au lever du rideau.
Nous voilà immédiatement transportés dans un temps lointain, une époque incertaine qui tient plus de la projection onirique que de la réalité historique. Une Renaissance rêvée. Des sculptures aux formes généreuses dans une Italie à la douceur lumineuse.
Bianca guette l’arrivée de son fiancé, le beau Giovanni. Son vœu le plus cher serait de le connaître un peu avant de l’épouser. Sa marraine – l’éclatante Samira Dedira, mon personnage préféré – lui révèle alors un secret que les femmes de la famille se transmettent de génération en génération : une peau d’homme.
Celle qui l’enfile se transforme alors en garçon, avec tous les attributs physiques de la virilité. Comment ne pas exploser de rire devant la performance de Laure Calamy – Bianca – devenue Lorenzo, quand il découvre cet appendice long et mou pendouillant entre ses jambes. Quand elle doit apprendre à marcher comme un homme, comme si le sol lui appartenait, et oublier les pas légers et feutrés des femmes.
La pièce se poursuit sur un rythme haletant, cadencé par les chansons écrites par Ben Mazué. On part à la découverte du monde masculin. On y rencontre les questions de quête d’identité, de la place de femmes, des injonctions de la société, des esprits fermés, de la joie de vivre, du respect de l’altérité. Beaucoup de questions actuelles traitées par le prisme d’un conte décalé.
Il y a de la folie et du drame, du rire et du cabaret, de l’amour et des couleurs. On en ressort l’optimisme chevillé au cœur et l’envie de croquer la vie.
Quand je reprends mon vélo, un jeune homme décroche le sien en fredonnant un air de la pièce. Sourires complices.
Sur le chemin du retour, la nuit est en train de tomber mais j’ai encore du soleil plein la tête. Comme un goût de sucre guilleret qui reste en bouche.
Deux jours après, je dévore la BD à l’origine de cette pièce, Peau d’homme de Hubert et Zanzim aux éditions Glénat. Pour revivre le plaisir alors que la pluie tombe drue.
Escapade hivernale sur la côte atlantique. Entre dunes dorées, rouleaux puissants et moments de détente face à l’océan.
Bordeaux. V nous prête sa voiture. L’océan est au bout de cette route qui serpente entre les forêts de pins. La lumière dorée de l’hiver atlantique baigne les troncs rouges, rebondit sur les flaques de sable, allume les grappes de mimosas.
Plage du Grand Crohot. Celle de mon enfance. Quand, lassés de la marée basse côté Bassin, nous allions à l’Océan. Ici, on ne va pas à la mer.
L’océan, ce sont les hautes dunes que l’on se dépêche de monter, jusqu’à perdre son souffle, puis de descendre en courant à pas de géant, tels des astronautes lunaires aux pieds nus. Ce sont ces plages qui s’étirent à perte de vue, où que porte le regard. Ce sont les rouleaux qui déferlent en longs rubans blancs échevelés par le vent sur une eau qui oscille entre un vert bouteille, un gris de plomb et un parme presque métallique.
En hiver, c’est un pêcheur qui surveille ses longues cannes pointées vers l’horizon. Des manteaux épais et des bonnets en laine, vite retirés – le soleil inespéré appelle une légèreté oubliée. Des chiens courant dans les petites vagues qui viennent mourir sur un replat. Des cerfs-volants dans le contre-jour. Un papa qui joue au ballon avec ses garçons. Des maillots de bain courageux. Un surfeur en combi. Des cheveux gris sur des chaises pliables. Des enfants chaussés de bottes en caoutchouc.
Et le jean d’Hortense qui sèche sur le grillage protégeant la dune.
Allongée sur ma doudoune qui fait office de paillasse, jambes nues, elle lit.
L’océan ronronne.
Ma gourde plantée dans le sable à côté du sac du pique-nique.
Un bateau traverse lentement l’horizon.
Des avions de chasse trouent le ciel.
Une voiture file sur la plage. Logo de la commune. Bientôt, il faudra nettoyer. Préparer les lieux pour la saison.
Déjà, l’après-midi tire à sa fin. Le soleil commence à raser les dunes.
Fin de la parenthèse océane.
Le soir, après les embouteillages, retirer les derniers grains de sable entre ses orteils.
Une feuille de papier, quatre tubes de peintures et quelques pinceaux. Déposer les couleurs et voir apparaître un paysage d’hiver. Se vider la tête et laisser de côté inquiétude, colère et culpabilité.
Chute : fait de tomber, action de se détacher, fait de passer à une situation plus mauvaise (Larousse). Inexorable, inévitable, malgré l’aide, malgré les alertes, il ne reste que l’impuissance face à la chute de ma maman.
Elle est tombée. Ça devait arriver. Ce n’est pas la première chute. Jusqu’à présent, elle réussissait à s’en sortir avec quelques éraflures et des hématomes. En octobre, elle avait explosé ses lunettes. La peur l’avait amenée à accepter un déambulateur. On lui a choisi un truc de compet’, en métal vert, avec une assise en cuir. Beau, léger, maniable. Pas ce truc en plastique noir qui hante les couloirs des EPHAD.
Mais un déambulateur, même le plus beau, c’est pour les vieux. Or, elle ne se résout pas à utiliser les marqueurs de vieillesse. Elle refuse d’être vieille. D’autant qu’à son âge, aujourd’hui, beaucoup sont juste un peu moins jeunes.
Elle a perdu l’équilibre en promenant son chien. Comme chaque fois. Son déambulateur est resté dans son appartement. Il sert de porte-manteau. Pompiers, Urgences. Épaule cassée (un nom plus compliqué en rapport avec l’humérus et une histoire de déplacement). Opération. Prothèse.
L’hôpital est saturé. Les urgences débordent. Les lits sont rares. Plus de 24h sur un brancard aux urgences. On veut la renvoyer chez elle en attendant la suite.
Mais la chute est aussi morale. Il y a longtemps que ma mère s’est mise en faillite d’elle-même. Les symptômes de ses maladies et un abandon personnel alimentent un effondrement permanent. De gros blocs en petits cailloux, tout se délabre. J’explique le champ de ruines. Les urgences se démènent. On lui trouve un lit. L’hôpital la garde.
Perdue dans le bleu clair des draps, shootée aux anti-douleurs, elle attendait son transfert quand j’ai finalement pu la voir quelques minutes. Je n’ai pas regretté d’avoir insisté contre son retour à domicile. Sa chute est vertigineuse. Et elle n’est pas terminée. Chaque étape me lamine.
J’ai récupéré le chien. Il restera certainement plusieurs mois avec nous.
Tarte aux pommes ou aux poires sont les gourmandises de l’hiver en attendant d’avoir la pêche cet été.
La tarte aux pommes, c’est l’incontournable de l’hiver. La lumière du four dans la pénombre du matin, la chaleur qui irradie la cuisine, les odeurs de pommes cuites et de pâte croustillante qui embaument toute la maison… De quoi réchauffer tous les sens.
De la farine, du beurre demi-sel et un peu d’eau. La base est simple. Le rouleau en bois affine la pâte. Un peu de beurre et de farine pour chemiser le moule pour une tarte ronde ou la plaque du four pour une version rectangulaire. Un bon économe et les épluchures de pommes tombent en volutes souples dans le bac à compost. Le couteau bien aiguisé autorise les tranches ultra-minces pour une tarte fine ou plus généreuse pour un gâteau plus épais. J’ai une préférence pour la version fine que je recouvre légèrement de garniture. Des œufs, un peu de sucre, une pointe de crème, un peu de lait, de la vanille ou de la cannelle bien mélangés.
Le four chaud va dorer l’ensemble, lui donnant de jolis reflets aux couleurs de ce soleil qui manque tant.
Les vagues gourmandes de la tarte aux pommes
La tarte aux poires, elle, est plus gourmande. Un pâte épaisse, de généreux morceaux de fruits et de la poudre d’amande pour absorber le jus. Elle fond en bouche et a l’art mettre moins de temps à disparaître qu’à être préparée. Livrée sur le campus par Uber Mum, la tarte a été partagée avec quelques privilégiés. Que ne ferait-on pas pour son étudiante préférée.
La généreuse tarte aux poires
La variante estivale opte pour les pêches avec de la poudre de pistaches. Elle se déguste idéalement dans un jardin ombragé, les pieds nus dans l’herbe épaisse, un chapeau de paille sur la tête. Ah la tarte aux pêches, elle a les saveurs du soleil, du farniente et des peaux hâlées. C’est la gourmandise de l’été.
Dans ma boîte aux lettres aujourd’hui, j’ai trouvé un trésor. Un rappel à une valeur essentielle et un appel à vivre généreusement.
Dans ma boîte aux lettres aujourd’hui, j’ai trouvé un trésor.
On pourrait croire que c’est mon porte-monnaie, posé sur la pile d’enveloppes. Une bonne âme l’a sûrement ramassé sur le trottoir. À l’intérieur, tous les billets retirés au distributeur le matin même. Ma carte d’identité – avec mon adresse, un vrai sésame. Carte bancaire. Pass Navigo. Carte vitale. Mon kit de survie du quotidien.
Petit gabarit que je glisse dans mon sac à main. Format pochette. Juste assez grand pour y ranger mon porte-monnaie, un livre, mon téléphone, une batterie externe, un carnet et mes clés. J’imagine très bien un geste distrait : ranger mes clés, sortir mon portable… Et le porte-monnaie qui glisse, qui tombe. Et moi, qui ne m’en rend même pas compte.
Mais le vrai trésor dans ma boîte aux lettres, c’est la confiance. En celui ou celle qui a ramassé mon porte-monnaie. Qui a pris le temps de lire mon adresse sur ma carte d’identité et de me le rapporter, intact. Sans rien ponctionner. Sans rien demander en retour.
Un geste simple. Un acte de pure honnêteté. Aux antipodes du repli sur soi, du cynisme et de ces sombres faits-divers qui font souvent la une. Je ne dis pas que ces travers n’existent pas. Mais la confiance, elle, est essentielle. Comment vivre ensemble si l’on se méfie de chacun ? Si personne ne tend la main ?
Cette personne restera sans doute anonyme. Mais son acte, lui, est remarquable. Merci à elle, et à tous ces anonymes qui rendent la vie plus belle, un petit geste à la fois.
Ou comment Magritte peut déverrouiller une facette d’Hortense.
Ne pas partir en vacances, c’est prendre le temps de laisser faner les maladies d’hiver en un froissement de mouchoirs
en papier. C’est aussi profiter d’habiter à proximité d’une ville qui fait rêver le monde entier, surtout depuis qu’elle a été si joliment mise en scène pour les jeux olympiques.
La pluie, le froid et les journées mornes n’incitent pas à se balader nez au vent dans les rues parisiennes. Alors il reste les musées. L’offre est monumentale. Sauf le lundi, où la plupart d’entre eux sont fermés. Seul Beaubourg ouvre ses portes et ses escalators extérieurs qui révèlent petit à petit une vue magnifique sur les toits parisiens. Même quand la tour Eiffel s’estompe dans les nuages.
L’expo phare du moment est celle sur le surréalisme. Une foule compacte piétine dans les allées, écoute doctement la voix d’André Breton reconstituée par une IA tout en découvrant son écriture serrée sur les pages de ses carnets. « Surréalisme » foisonne d’œuvres plus ou moins connues, bifurque entre les amitiés et les rivalités, les nationalités, les genres, les supports, les formats, les inspirations. L’ensemble est gigantesque, limite indigeste.
Et puis il faut aimer. Ce n’est pas mon courant favori même si la démarche est passionnante. Un artiste en particulier m’a pourtant fait énormément vibrer, Max Ernst. Je connaissais un peu, de loin, de nom. Une vraie rencontre. C’est une de ses œuvres, L’ange du foyer, qui a été choisie pour l’affiche de l’exposition. Personnellement, je suis restée subjuguée par ses forêts.
Max Ernst, La Forêt, 1927Max Ernst, La Grande Forêt, 1927Max Ernst, Vision provoquée par l’aspect nocturne de la porte Saint-Denis, 1927
J’avais traîné Hortense avec moi. Qu’elle découvre par elle-même des œuvres qu’elle peut aimer, critiquer, détester. Peu importe, du moment qu’elle s’autorise ses propres choix. Elle a traversé l’exposition sans s’attarder. Trop de monde. Contempler une œuvre tenait de la bataille opiniâtre bien que silencieuse. Elle, ce sont les œuvres de Magritte qui ont systématiquement retenu son regard.
René Magritte, Les valeurs personnelles, 1952
Ses toiles font écho aux sentiments d’Hortense. Ce décalage permanent, légèrement absurde, derrière une première impression de normalité, c’est un univers qui lui parle, dans lequel elle se reconnaît. Car sous son air désinvolte, Hortense cache surtout une grande sensibilité. Comme elle ne sait pas vraiment quoi en faire, comme elle se sent très en marge des normes attendues, elle se verrouille. Magritte a été comme une clé.
Dans l’immensité de cette exposition, Magritte n’est qu’une anecdote. Mais il m’a permis de comprendre une facette d’Hortense. Rien que pour ça, ça valait la peine d’affronter la foule.