Dîner à la maison. Enfourcher mon vélo pour faire les courses ce matin. Ranger la maison. Cuisiner à la cocotte pour être tranquille ce soir. Des fleurs fraîches sur la table. Des odeurs d’épices qui parfument la maison. Musique douce. Lumières tamisées.
Quand les copains arrivent, manteaux trempés, journée de pluies ; embrassades, petits cadeaux. Puis c’est parti pour les vieilles bouteilles. Grands noms. Camaïeux de rouges sombres, presque caramel pour un vieux Bourgogne.
Discussions croisées. Entrée, plat, fromages et au dessert, des galettes, parce que c’est encore la saison. Une fève reste sur la table à la fin du repas et une bouteille de Porto vintage 1987.
On secoue la nappe. Les oiseux mangeront les dernières miettes. On remplit le lave-vaisselle.
Les bougies terminent de se consumer. La musique berce les derniers relief d’un bon repas.
Quand Cendrillon ou Blanche-Neige s’endorment, il faut attendre la venue du Prince Charmant pour qu’elles rouvrent les yeux. Eglantine, elle, se ragaillardit avec les maths. Et je ne parle pas de quelques énigmes mathématiques amusantes pour se changer les idées. Non. Pour récupérer, Eglantine a suivi un mooc de Polytechnique sur les probabilités.
Il s’agit de calculer ses chances de battre Djokovic en fonction de la probabilité de marquer un point. Ce sont des maths avec plus de lettres que de chiffres et des formules à rallonge. Elle a pris un carnet spécial pour y noter ces cours supplémentaires. Elle a d’abord réfléchi au brouillon en suivant les vidéos présentées par les Polytechniciens et les indices distribués au fil de la leçon pensée par les professeurs de la prestigieuse école.
Finalement, elle a absolument tout compris et s’est bien amusée. A tel point qu’elle me disait cet après-midi, un sourire enthousiaste illuminant son visage, « j’ai limite envie d’écrire un algorithme python pour calculer tout ça ». Oui, oui, oui…
Samedi dernier, le professeur qui la suit depuis plus de trois ans pour ses douleurs et sa fatigue chroniques, me demandait ce qui m’étonnait le plus chez Eglantine. J’ai eu bien du mal à répondre parce qu’Eglantine a toujours été pour moi un étonnement permanent. Quand je l’écoute me parler de maths ou de chimie, quand je vois la somme des connaissances qu’elle engrange, clouée au fond de son lit, je suis bluffée.
Sa prochaine leçon ? Les fractales. Croyez-le ou non, les fractales peuvent être très artistiques et franchement hypnotisantes. Si je vous dis que le chou romanesco est une fractale, peut-être serez-vous aussi épatés que moi. Heureusement, tout de même, elle a son père qui partage les mêmes passions scientifiques et à qui elle peut se frotter pour mettre un peu à l’épreuve ses acquis.
Si son corps a besoin d’un rythme adapté pour tenir la longueur, son cerveau, lui, a un insatiable appétit. Les Promenades mathématiques de Polytechnique la ressourcent autant qu’une balade en forêt. Heureusement, elle n’a pas besoin que je comprenne tout ce qui la fait vibrer. Et elle sait comment me rallier à son intérêt matheux. La beauté, la magie du monde.
Ce qui ne signifie pas que je n’ai rien à lui transmettre. Ainsi, alors que nous rentrions de sa séance d’ergothérapie cet après-midi, elle regrettait qu’un rayon de soleil ne vienne pas illuminer les champs d’un vert tendre et les nuages aux belles nuances de gris mauves biffés par de grands pylônes électriques. « Ca aurait fait une belle photo. » Cet art de voir la poésie du monde à travers les couleurs du quotidien, c’est grâce à moi. Bouffée de tendresse et d’émotion quand elle m’a dit ça.
Notre espoir aujourd’hui est de réussir à l’accompagner vers son autonomie, qu’elle puisse construire sa vie, quelle qu’elle soit, et quels que soient les chemins de traverse qu’elle devra emprunter à cause de sa santé.
J’aimerais ce soir réussir à associer un auteur norvégien du XIXè séché et une autrice, actrice et metteuse en scène du XXIè siècle (même si, comme moi, elle est née au XXè). Le rapport ? Un hasard du calendrier et la place des femmes dans la société.
J’ai terminé, hier, la lecture d’Une maison de poupée de Henrik Ibsen. J’avais découvert ce monument culturel norvégien lors de ma visite de l’exposition Munch au Musée d’Orsay en novembre. J’avais acheté le livre à la boutique du musée, avais entamé les premières pages, puis l’avais oublié dans un coin.
Je l’ai repris cette semaine. D’abord scandalisée par la vision de la femme dans les premières scènes, j’ai ensuite découvert toute la complexité de Nora, ses choix, ses sacrifices et ses désillusions derrière une joie de vivre commandée. Telle une poupée guillerette, elle chante et danse pour son mari Torvald, qui ne lui prête pas plus de cervelle qu’à une alouette ou un écureuil. Petits surnoms dont il accable amoureusement cette femme qui répond à tous ses désirs et à toutes les convenances. En façade en tout cas.
Puis, trahie et incomprise, rejetée et méprisée, elle finit par rejeter cet homme qui ne l’aime pas pour ce qu’elle est mais pour ce qu’elle représente, poupée entre ses mains après avoir été celle de son père. Je ne connaissais rien d’Ibsen. Je ne m’attendait pas à la fin de la pièce. Car, loin de se jeter dans les bras de son mari après que la tempête se soit éloignée, elle décide de le quitter sans sommation. Elle veut se forger ses propres opinions et agir pour elle-même.
J’ai été joyeuse, voilà tout. Et tu as toujours été si gentil pour moi. Notre foyer n’a jamais été rien d’autre qu’une salle de récréation. Ici, j’ai été ton épouse-poupée, tout comme à la maison j’étais l’enfant-poupée de papa. Et mes enfants, à leur tour, ont été mes poupées.
A peine avais-je fermé ce livre que je décidais d’aller voir Féministe pour homme, le spectacle de Noémie de Lattre qui jouait ce soir au théâtre d’Antony. Je n’avais pas été très motivée au départ par le côté féministe de cabaret (satin, paillettes et plumes rose pastel), mais tout le monde au théâtre m’en disant le plus grand bien, nous y sommes allés ce soir.
Noémie de Lattre dans Féministe pour homme Photo de François Fonty prise sur le site de L’Azimut
Noémie de Lattre a de l’énergie, de l’humour, de la souplesse et une belle paire de seins. Elle a aussi un sacré régime de parole et débite anecdotes et chiffres du sexisme ordinaire à un rythme effréné. Elle vise juste et sait alterner légèreté et profondeur pour faire passer son message engagé. Elle cadence son spectacle de jingles dansés, pseudo Beyoncé blanche et parisienne. Elle assume ses formes, son âge et son histoire, tout en invitant sur scène toute la diversité des femmes.
Si Ibsen émancipe son héroïne avec violence (elle quitte mari et enfant sans rien garder de sa vie avec eux), Noémie de Lattre lutte, elle, pour l’égalité des hommes et des femmes, contre le patriarcat mais sans stigmatisation des hommes. Elle aborde la linguistique et la grammaire, la charge mentale, la place de la femme dans l’espace public, la vision de la mère dans la société, l’objectification de la femme tout comme le plaisir sexuel et les caractéristiques du clitoris.
Quand tu veux insulter une femme, tu la traites de pute. Quand tu veux insulter un homme, tu le traites de fils de pute. C’est la double peine !
Mais comment s’appelle le client d’une pute ? Noémie de Lattre propose de lui inventer un mot, qui pourrait devenir une insulte, lui aussi.
Ou encore, le sexisme c’est de dire « une femme, c’est bien, un homme, c’est mieux ».
D’Ibsen à Noémie de Lattre, le féminisme n’est pas un sujet nouveau, ni récent. Et il n’a pas fini de faire parler de lui. Tant mieux si c’est avec autant de plaisir que ces deux auteur.ices.
Eglantine adore la chimie, s’enthousiasme pour les mathématiques, se passionne pour les sciences de la vie et de la terre, en pince pour le débat philosophique et se détend même en anglais.
Cette première année de Terminale, avec un emploi du temps allégé grâce à un étalement d’épreuves sur deux ans, se déroule vraiment très bien. Tous les jours, quand je la ramène en voiture, elle me raconte ses cours avec enthousiasme. Je ne comprends rien, ne retiens rien de tous les termes scientifiques qu’elle manie sans hésitation mais je participe activement à la conversation.
Elle reformule ainsi les nouvelles notions apprises durant la journée et vide sa tête de tout ce qu’elle a emmagasiné. Son enthousiasme est communicatif. J’aime énormément l’écouter.
Ce soir cependant, elle était au bord de la crise de larmes. Écrasée de fatigue. A bout de force. On croise les doigts pour qu’elle récupère rapidement.
Elle va beaucoup mieux, mais le chemin est encore long avant qu’elle trouve un équilibre.
Pourquoi parler du temps ? Le temps qu’il fait. Le temps qui passe. Le temps d’un clin d’œil. Le temps infini. Le temps pour soi, le temps en temps, le tant pis, le tant mieux. Pourquoi écrire un blog que vous êtes quatre à lire ? Cette écriture est-elle pour vous ou pour moi ?
Assez égoïstement, je dirai que j’ai repris ce blog avant tout pour moi. Loin d’un journal intime où les émotions s’étalent sans filtre. Pas un media qui afficherait des articles fournis, avec une ligne éditoriale claire, des objectifs statistiques. Pas un défouloir non plus, puisque je ne suis pas vindicative, aucun ressentiment à déverser.
Plutôt une gymnastique quotidienne. Un défi aussi. 365 billets en 2023. Un par jour. Garder ce qui me fait vibrer, le partager avec quelques proches. Les internautes perdus, arrivés ici par hasard, sont les bienvenus. Mon domaine n’est pas privé mais il n’y a pas de panneaux pour en annoncer l’entrée, pas de plan pour y venir.
C’est rassurant d’écrire en catimini. Pas de commentaires acerbes, de messages de reproche, de débats stériles.
Écrire me fait du bien. Comme mon chat qui dort dans un rayon de soleil. Écrire dans un rayon de soleil, ce serait bien l’idée de cette Tasse de thé. Cet instant où la vie s’illumine, où l’on s’arrête pour regarder une ombre ou un reflet nés de la lumière.
Parler du temps, qu’il fait, qui passe, pour se retrouver soi. Une pause partagée autour d’une Tasse de Thé qui se prolongerait dans votre lecture. Ensemble, un peu, beaucoup, passionnément, pas du tout… chacun, chacune reste libre d’effeuiller sa marguerite.
Un chat dormant, une marguerite, un rayon de soleil, une tasse de thé. On n’est pas bien là ?
Je ne sais plus quel âge j’avais la première fois que j’ai visité une exposition. J’étais en primaire. Une sortie scolaire. J’ai été subjuguée par les peintures de Modigliani que nous étions allés voir. Les couleurs. Les longs cous. Les yeux vides. Puis j’ai mis très longtemps avant de retourner voir des œuvres d’art. J’en garde un certain décalage, un sentiment de retard perpétuel de connaissance et une soif de découvrir. Car rien n’est plus émouvant que de voir des œuvres d’art de ses propres yeux. Les toiles vibrent. Il se passe réellement quelque chose.
Vue sur la fondation Louis Vuitton en arrivant à vélo
J’avais un peu de temps ce matin après mon travail au théâtre, avant de rejoindre une cousine d’Olivier pour un café aux Batignoles. J’ai fait un détour par la fondation Louis Vuitton pour visiter l’exposition Monet-Mitchell dont les couleurs chatoyantes de l’affiche m’attiraient depuis des mois. Peu de file d’attente, même sans avoir réservé d’entrée. Contrôle des sacs, gourde consignée. Casque et batterie du vélo au vestiaire. Tout est fluide. Il n’y a pas foule.
Tout de suite, les toiles de Monet et Michell entament une conversation picturale. Le choix des vis-à-vis est judicieux. La douceur suave de Monet. La fougue éclatante de Mitchell. La foule est clairsemée. On peut profiter des perspectives qui nous plongent dans un monde onirique, vibrant, sensationnel.
Je garde une préférence pour Monnet, ses agapanthes ondoyantes et ses nénuphars éclatants. Les reflets ondulants du bassin. Les branches du saule qui s’écrasent au sol en cascades colorées. Les gestes de Mitchell sont plus nerveux et plus abstraits. Les lignes se cassent en pointes. Le paysage ne se devine pas, il finit par nous imprégner sans pour autant donner la possibilité de le décrire.
Détails des peintures de MonetDétails des peintures de Michell
Le velouté des pastels qui accompagnent les poésies de Jacques Dupin apportent un peu de répit dans l’impétuosité de Mitchell. Je suis sous le charme.
Dans chaque salle, les tableaux de Monet palpitent sous les bleus, les mauves, les verts, les jaunes, les roses et les oranges alors que les œuvres de Michell imposent leurs couleurs vives qui sautent, coupent, trépignent et carillonnent, remplissant l’espace d’une énergie qui dynamise le dernier Monet. Ce Monet qui s’est affranchi des limites de l’espace et des perspectives pour choisir la couleur et la lumière, sans véhémence, tout en fluidité.
Glycines, 1919-1920Le triptyque de L’Agapanthe (1915-1926) réuni pour la première fois.
Enfin arrive la salle de La grande vallée. Une série de tableaux immenses de Joan Mitchell. Endeuillée, elle peint la vallée des jeux d’enfants de son amie compositrice Gisèle Barreau. Pourtant, ce n’est pas la mort que l’on côtoie mais bien la vie, dans un hymne joyeux et foisonnant. On a envie de s’allonger dans cette Grande vallée merveilleuse où dominent le bleu et le jaune.
Détails de la série La grande vallée de Joan Mitchell (1982-1983)
Il est déjà l’heure de partir. Je n’aurai pas le temps de voir la rétrospective consacrée à Joan Mitchell au rez-de-jardin. Heureusement, j’ai fait le plein de couleurs. Suffisamment pour affronter la pluie qui va rythmer le reste de la journée.
Dimanche matin dans l’Essonne. Hortense et sa copine Chloé font des bulles à 11 mètres dans une fosse de plongée. En face de la piscine, un terrain de foot. Deux équipes, vingt-deux gars sur une pelouse au vert parfaitement synthétique. Boussy-Quincy reçoit le FC Massy. Ca court, ça crie, ça s’échauffe un peu. Il y a celui qui râle tout le temps et qui tombe au moindre contact en criant à la faute. Puis qui s’écarte, dépité mais fier, le torse bombé, Aldo Maccionne des terrains, l’esprit revanchard.
Il y a l’arbitre, barbe fournie de hipster, lunettes de soleil, bonnet rouge de grosse laine, dégaine et vitesse désinvolte d’un Big Lebowski. Une sorte d’ovni au ventre généreux.
Il y a des blancs, des noirs, des peaux mates, des barbus, des chevelus, des rastas, des chauves, des grands, des petits, des tout fins, des plus ronds, des bruns, des blonds et des poivre-et-sel. Les chaussettes montent jusqu’aux genoux. Bleu ciel pour les Massicois. Noires pour les Quincéens. Assorties aux maillots, élément fondamental de l’équipe, de son esprit, de son image.
Pour ces plus forcément tout jeunes, pas vraiment vieux non plus, qui ont tous gardé leur âme d’enfant face à un ballon rond, l’envie de gagner, l’esprit de la bataille, le plaisir de courir font tout le plaisir d’un dimanche matin doucement baigné d’un soleil d’hiver, sur un terrain détrempé par les pluies de la nuit.
Sur la touche, les entraîneurs invectivent, les remplaçants s’échauffent. Adossés aux barrières, les copains regardent et encouragent.
11h30. Le coup de sifflet final retentit . Les Vétérans D2 retournent aux vestiaires. Les pas sont fatigués mais, dans leurs têtes, le match n’est pas terminé. Un peu plus tard sur le parking, ils seront encore en train de refaire le match, animés de l’énergie de ceux qui sont persuadés de mieux faire la prochaine fois.
Désormais, le parking est vide et calme. Encore quelques minutes et j’irai récupérer les plongeuses.
Pour l’épiphanie, j’ai testé la galette des rois aux pommes. Certains crieront au sacrilège mais, moi, je n’ai pas grandi à la frangipane. Dans mon sud-ouest natal, c’était la couronne briochée aux fruits confits qui était la reine. Si bien que je suis très ouverte aux variations de galettes.
Ingrédients :
2 pâtes feuilletées 3 pommes pour la garniture Environ 500g de compote de pomme 1 cuillère à soupe de farine 4 cuillères à soupe de sucre 1 jaune d’oeuf
Recette :
Préchauffez le four à 180°.
Étape 1 :
Étaler une pâte feuilletée sur une plaque de cuisson. Mélanger une cuillère de sucre et une cuillère de farine et l’étaler sur le fond de pâte.
Étape 2 :
Répartir la compote de pomme en laissant de l’espace sur les bords (environ 1 cm). Mettre la fève.
Étape 3 :
Éplucher les pommes et les couper en fines lamelles. Disposer les lamelles de pomme sur la compote. Saupoudrer 3 cuillères à soupe de sucre.
Étape 4 :
Délayer le jaune d’œuf avec une cuillère à soupe d’eau. Mouiller le bord de la pâte avec l’oeuf délayé. Recouvrir avec la deuxième pâte feuilletée. Souder les bords en appuyant dessus avec vos doigts. Consolider la fermeture en écrasant les bords avec une fourchette.
Étape 5 :
Faire une cheminée au centre de la galette en prenant soin de ne pas transpercer la pâte du dessous. Ça permettra à la vapeur de s’évacuer pendant la cuisson. Strier la pâte avec la pointe d’un couteau en prenant garde de ne pas transpercer la pâte. Dorer la pâte au pinceau avec le jaune d’œuf.
La pleine lune est envoûtante. Elle aimante et fascine. Diffusant sa lumière blanche sur les nuages moutonnant autour d’elle, le rond éclatant me subjugue.
La photo, prise avec mon téléphone, n’est pas de très bonne qualité. Mais j’espère réussir à partager cette douce magie nocturne .
mélancolie blanche sur les branches décharnées Vénus de la nuit
Depuis le 1er février 2018, de petits panneaux triangulaires sont apparus sous les feux rouges. En leur centre, un vélo jaune et des flèches directionnelles indiquent aux cyclistes qu’ils peuvent avancer même si le feu est rouge. Pour eux, ce n’est qu’un céder le passage.
Dans la réalité, malheureusement, beaucoup de cyclistes partent du principe que tous les feux rouges sont, pour eux, des céder le passage. Ils les grillent donc allègrement. Obligeant, parfois, les piétons à retarder leur traversée pour ne pas se faire renverser. Certains ralentissent à peine au passage d’un feu rouge. Les piétons doivent redoubler de vigilance avant de s’engager alors que c’est vert pour eux.
C’est le cas sur la route principale, ancienne Nationale 20, qui traverse notre ville. Une grande ligne droite parsemée de feux, à peu près tous équipés des panneaux pour permettre aux vélos de ne pas trop s’arrêter. Nombreux sont les amis et voisins qui ont manqué se faire renverser.
Mais je suis aussi cycliste. Quarante kilomètres aujourd’hui à travers Paris. Une bonne ballade. Alors je suis heureuse de pouvoir au maximum passer les feux sans poser pied à terre quand les carrefours sont déserts. Quitte à me faire enguirlander par un couple très âgé qui s’apprêtait à traverser au rouge, alors que j’avais, moi, un simple céder le passage.
La plupart des gens ne savent certainement même pas que ces panneaux existent, notamment les automobilistes.
Comment leur en vouloir, cependant, quand je vois tous ces cyclistes qui zigzaguent dangereusement entre les piétons et les voitures alors qu’ils n’ont même pas le petit triangle magique ? Et plus on arrive au coeur de Paris, puis la densité des cyclistes augmente, chacun entendant être le premier de la file, trépignant pour passer plus vite, sans prévenir de ses mouvements et sans lumière.
Pourtant, tout pourrait être si fluide, si nous adaptions tous notre vitesse au nombre des personnes sur la piste. C’est mécanique, plus nous sommes nombreux, moins nous pouvons rouler vite. Même à vélo. Et si nous, cyclistes, respectons le code de la route, la circulation des deux roues, aussi, sera plus fluide.
D’un autre côté, dans un monde merveilleux, il y aurait moins de voitures. Elles n’auraient ainsi plus besoin de se garer en double-file sur les pistes cyclables et feraient peut-être attention avant de tourner en coupant la route d’un vélo, de nous doubler à toute vitesse dans une rue limitée à 30, d’ouvrir la portière sans regarder ou de s’engager dans un carrefour alors qu’elles ne peuvent pas vraiment avancer, bloquant ainsi toute la circulation.
Un jour peut-être…
En attendant, quel plaisir de lever le nez pour profiter de la beauté de la ville, même sous la grisaille hivernale. Traverser le quartier latin, Oberkampf et ses cafés tranquilles en milieu de journée, l’animation des Grands Boulevards et la Seine écoulant monumentalement sa nuée de bateaux Mouche.