C’est une belle meulière aux volets turquoises, entourée d’un jardin à l’anglaise. Végétation foisonnante, même au cœur de l’hiver, quand la nature dort sous la grisaille. En ce matin glacial, alors que je pousse le portail pour entrer mon vélo, un rayon de soleil, ténu, fugace mais intense, attire mon regard.
Savoir regarder, c’est réussir à s’émerveiller des choses simples qui nous entourent.
Choses simples, cet entrelacs de branches et de feuilles ? De mon point de vue, oui. Car je n’ai qu’à ouvrir les yeux pour en profiter. Comme la majorité des humains, la nature me semble simple, parce qu’elle est là. Ne dit-on pas, pour quelque chose de facile, que c’est naturel ? Elle est naturellement douée, il est naturellement drôle. C’est inné, c’est facile, c’est naturel.
On sait pourtant aujourd’hui que la nature est bien plus complexe que le simple regard émerveillé que nous posons sur elle. Nous, les humains, la domptons toujours plus, nous l’exploitons à notre service. Moi la première, qui vit dans un confort douillet, baigné de technologie. Celle que j’utilise notamment pour photographier et partager mes mots. Complexe, elle nécessite des processeurs puissants, des matériaux rares et chers que des femmes et des hommes sont allés extraire, sur lesquels d’autres humains ont longuement réfléchi pour réussir à créer cette technique avancée. Cette complexité me parle parce que je la connais. Je me reconnais dans ces humains qui la fabriquent et dans ceux qui l’utilisent.
Sous la simplicité de la nature se cache également une force complexe et sophistiquée. Quand je regarde ce jardin, j’oublie que sous la terre s’étend un réseau de racines, à l’image des relations entre les êtres vivants, les arbres, les plantes et les autres animaux, dont l’humain commence à peine à prendre la mesure.
Je regarde cet arbuste devant la belle meulière, la grille turquoise, le rayon de soleil. Et mon esprit vagabonde sur tous les possibles de la vie. Regarder, s’émerveiller, penser… une porte ouverte vers la création.
Quand je repars un peu plus tard, le soleil n’illumine plus le feuillage. La magie du moment est passée. Il me reste cette photo. Et ces impressions volatiles que je partage avec vous.
















