La collerette

« Et il devra porter une collerette pendant une semaine ».

Passage à la caisse de la clinique vétérinaire. Anti-inflammatoire. Antibiotique. Et un grand morceau de plastique semi-rigide transparent, orné d’un ruban vert. Le dernier West side story félin dans le jardin a laissé Django avec une plaie de morsure purulente derrière l’oreille.

Première étape, se familiariser avec la collerette. Fermer le cône, passer la languette dans les différentes fentes entre les deux épaisseurs de plastique. Dessus-dessous. Dessus-dessous. Nouer le ruban. « On doit pouvoir glisser deux doigts » a conseillé la véto. Mais pas plus. Les chats sont très agiles pour retirer une collerette.

Je m’entraîne à manipuler le plastique. Posé sur mes genoux, mon gros chat est encore un peu sonné par la douleur et l’inflammation. Il se laisse faire quand je lui pose maladroitement cet immense tour de cou en plastique. Puis vient la panique.

Il saute au sol et tente de s’extraire du cône transparent. Il parcourt tout le salon en zigzagant en marche arrière. Sa tête, alourdie par la collerette, traîne devant lui, se cogne dans les pieds des tables et des chaises. Petit à petit, il passe en marche avant. Bruit sourd du plastique qui heurte les portes et les meubles. Django ressemble à un PNJ de jeu vidéo qui bugue dans le coin d’une pièce. Incapable d’estimer une distance il reste bloqué à l’entrée de la cuisine. Il lui manque deux centimètres pour que la collerette arrête de buter sur le montant de la porte.

Après deux jours, il est un peu plus à l’aise. La douleur et l’inflammation doivent avoir bien diminué, il a retrouvé un peu d’énergie. Suffisamment pour attaquer la collerette à coups de pattes arrière. Il me jette des regards noirs à chaque fois que lui remets après avoir désinfecté sa plaie.

J’ai bien essayé de le laisser sans collerette mais il passe alors sa patte consciencieusement humectée de salive sur la plaie.

Encore cinq jours à le voir cogner sa collerette à chaque marche dans l’escalier et finir par attendre mollement que ça passe, la tête posée sur le bord de sa banquette préférée, les pattes tombant sur le côté, vaincu. Il a le même air malheureux que Doug avec sa collerette de la honte dans Là-haut.

Collerette, ça rime peut-être avec guinguette mais, saperlipopette, pour notre vieux matou, ce n’est pas la fête.

Chat du soir

Dans le faisceau de ma petite liseuse, un livre de Camille Laurens au format poche. La tête bien calée sur mon oreiller, j’entame la lecture qui accompagnera mon effondrement dans le sommeil.

Mon gros matou saute lourdement sur le lit et avance vers moi d’un pas chaloupé. Installé hiératiquement sur ma poitrine, il me toise puis donne une grand coup de tête dans la main qui tient le petit livre.

C’est son heure, sa place. Il vient chercher son câlin. Pas de lecture qui tienne.

J’attrape mon téléphone sur la table de nuit. J’aime la lumière sur le pelage de mon éternel mécontent, ses longues moustaches strient la pénombre de la chambre. Une caresse de la main et mon tendre pépère plisse les yeux de plaisir. Je prends la photo.

C’est celle que je choisi pour ce lundi.

Un bruit par la fenêtre ouverte et voilà Django qui sursaute et s’enfuit. Il revient quelques minutes plus tard s’avachir en travers de mon ventre, son museau humide calé contre mon bras. Alors que je continue ma lecture, j’entends le doux râle qui lui sert de ronronnement.

Le câlin du soir est un rituel incontournable. Ce n’est pas un livre qui ca l’en priver.

Vivre avec des chats

C’est passer l’aspirateur trois fois par jour mais avoir toujours des poils sur un fauteuil.

C’est ouvrir la porte vingt fois parce qu’il veut sortir, parce qu’elle veut rentrer puis ressortir. Un ballet sans fin de va-et-vient. Oui, il va falloir penser à poser une chatière.

Mais j’aime bien, quand je lui ouvre la porte pour qu’elle entre, la façon dont Maya fait systématiquement un détour pour se frotter contre mes jambes en miaulant vivement.Genre, « Ah enfin tu m’ouvres, j’ai failli attendre ! Mais merci quand même. »

J’aime la démarche nonchalante de notre vieux et gros Django, sa manière de s’allonger méthodiquement en plein milieu du passage, de courir en contrôlant plus ou moins ses dérapages dès qu’il entend ses croquettes tomber dans le distributeur, de croire qu’on ne le voit pas quand il grimpe sur le plan de travail de la cuisine à la recherche d’un petit truc à voler, et de détaler, l’air surpris, quand on hausse alors la voix.

Je raffole de la façon dont Maya dort en torsade, les pattes arrière dans un sens, la tête dans l’autre, comme un tee-shirt essoré à la main. Regarder Django dans son sommeil, c’est avoir envie, comme lui, de s’enfoncer dans le moelleux d’une couverture sans penser à rien, croiser les pattes et s’abandonner aux rêves.

Vivre avec des chats, c’est avoir des câlins de temps en temps, quand ils veulent. Ils sont très indépendants. Mais c’est aussi avoir une présence féline permanente à ses côtés. Maya qui se roule dans la corbeille de linge au moment du repassage. Django qui vient voir comment se passe la douche. L’un qui vient s’installer sous un buisson voisin pendant que j’élague le noisetier, l’autre qui chasse les papillons juste à côté. Et en avoir un collé de chaque côté de mes jambes pendant la nuit.

Vivre avec des chats, c’est aussi les enfermer quand un faisan imprudent vient se perdre dans le jardin. C’est les regarder frémir et claquer des dents derrière la fenêtre alors que rouges-gorges et mésanges volètent de l’autre côté de la vitre. C’est se rassurer un peu car nos arbres sont très hauts et suffisamment nombreux pour que les oiseaux y trouvent refuge, à l’abri de nos félins chasseurs même si pas affamés.

Vivre avec des chats, c’est passer la main dans leur pelage – celui de Maya est particulièrement doux – écouter leurs ronrons, accueillir un museau au creux de son bras – ça, ça vaut surtout avec Django qui aime enfouir sa tête contre moi.

Vivre avec des chats, c’est aussi avoir une montée d’angoisse quand l’un deux ne rentre pas le soir. C’est débouler dans le jardin quand on entend les feulements d’une bataille à venir. C’est détester les voitures qui roulent trop vite dans la rue. On n’a pas envie qu’ils meurent comme ça.

C’est aller en urgence chez le vétérinaire un samedi matin parce qu’une morsure, une patte douloureuse, un Django neurasthénique qui ne daigne même plus avaler une croquette.

Vivre avec des chats, c’est mettre de la joie et de la chaleur dans son quotidien même quand il va falloir faire avaler des comprimés matin et soir à Django pendant les dix prochains jours.

Câlin félin

Les amis sont partis. La maison a retrouvé son calme après les discussions animées du dîner. Seul le lave-vaisselle ronronne dans la cuisine.

Django est rentré de sa balade nocturne, la truffe froide et l’appétit insatiable. Il a vérifié que rien de mangeable ne traînait dans la cuisine. Dépité, il m’a rejointe dans le salon.

Lumières tamisées sur les livres entassés devant la cheminée. Je décompresse dans un fauteuil.

Django saute sur mes genoux, me laboure d’abord les cuisses avec ses pattes avant puis se blottit sur mon ventre. Le nez calé au creux de mon bras.

Il fait ça depuis qu’il est bébé. C’est maintenant un gros chat, mais il retrouve son âme de chaton tous les soirs.

Et moi, j’adore sentir cette boule de poils roux et blancs se serrer tout contre moi.

Ambiance lendemain de fête

Le soleil se coule dans les courbes des grands verres à vin sur la table, illumine les feuilles des fleurs dans le vase et crée des jeux de d’ombres dans les rideaux. Dehors, quelques chants d’oiseaux. Un enfant passe joyeusement dans la rue. Hortense est partie à l’anniversaire d’une amie. Olivier et Eglantine sont encore dans leurs lits.

Même les chats, rassasiés et sereins, dorment dos-à-dos sur le gros édredon de nos soirées télé hivernales.

L’horloge égrène les minutes dans une douceur moelleuse. La matinée tire à sa fin mais rien ne presse. Ma tasse de thé est posée sur la table basse. Lovée dans le canapé, je commence un livre.

Un chat, une marguerite et un rayon de soleil

Pourquoi parler du temps ? Le temps qu’il fait. Le temps qui passe. Le temps d’un clin d’œil. Le temps infini. Le temps pour soi, le temps en temps, le tant pis, le tant mieux. Pourquoi écrire un blog que vous êtes quatre à lire ? Cette écriture est-elle pour vous ou pour moi ?

Assez égoïstement, je dirai que j’ai repris ce blog avant tout pour moi. Loin d’un journal intime où les émotions s’étalent sans filtre. Pas un media qui afficherait des articles fournis, avec une ligne éditoriale claire, des objectifs statistiques. Pas un défouloir non plus, puisque je ne suis pas vindicative, aucun ressentiment à déverser.

Plutôt une gymnastique quotidienne. Un défi aussi. 365 billets en 2023. Un par jour. Garder ce qui me fait vibrer, le partager avec quelques proches. Les internautes perdus, arrivés ici par hasard, sont les bienvenus. Mon domaine n’est pas privé mais il n’y a pas de panneaux pour en annoncer l’entrée, pas de plan pour y venir.

C’est rassurant d’écrire en catimini. Pas de commentaires acerbes, de messages de reproche, de débats stériles.

Écrire me fait du bien. Comme mon chat qui dort dans un rayon de soleil. Écrire dans un rayon de soleil, ce serait bien l’idée de cette Tasse de thé. Cet instant où la vie s’illumine, où l’on s’arrête pour regarder une ombre ou un reflet nés de la lumière.

Parler du temps, qu’il fait, qui passe, pour se retrouver soi. Une pause partagée autour d’une Tasse de Thé qui se prolongerait dans votre lecture. Ensemble, un peu, beaucoup, passionnément, pas du tout… chacun, chacune reste libre d’effeuiller sa marguerite.

Un chat dormant, une marguerite, un rayon de soleil, une tasse de thé. On n’est pas bien là ?

Heures félines

Le matin, Maya partage un câlin avec Hortense. Avec moi, elle est nettement plus intéressée par mon petit-déjeuner.

Maya s’est installée sur mes genoux alors que je termine mon petit-déjeuner. Tous les matins, après avoir mangé ses croquettes, Django sort. Il utilise rarement la litière dans la maison. Il préfère la terre parfumée des jardins. A l’instar de tous ses congénères du quartier, il dépose régulièrement de petites surprises dans celui de la voisine. Et nous l’entendons râler copieusement aux beaux jours, quand ses petits-enfants marchent sur les nombreuses mines déposées par les chats.

Donc Django est dehors et Maya s’ennuie un peu. Le matin, elle est très joueuse. Elle commence généralement à asticoter Django quand il dort encore lourdement sur notre lit. Une joyeuse bataille s’engage et je les chasse au mieux pour qu’ils ne réveillent pas Olivier. Surtout en ces précieux dimanches de grasse matinée.

Django est dehors et il y a du beurre sur la table. Maya s’installe d’abord sur la chaise à côté de moi. Sa petite tête effilée pointe juste au niveau de la table. Rapidement, elle pose ses pattes sur le meuble défendu. Elle a compris que c’était interdit mais la tentation est trop forte. Ces miettes de pains et ce beurre tendre et odorant ouvert à portée de museau aiguisent sa gourmandise.

Je la repousse plusieurs fois. Elle tente une approche différente et se coule sur mes genoux en ronronnant. J’adore. Elle se laisse caresser en fermant les yeux de plaisir. J’exulte. Elle pose sa tête sur mon bras. Puis une patte. Puis deux. Et se hisse enfin dans une approche sans vergogne du beurre abandonné devant moi.

Je la repousse plusieurs fois. Elle se glisse dans mes caresses pour mieux tenter de nouvelles approches. Je profite de ce câlin intéressé. Quand je replie le beurre dans son papier, elle m’abandonne à la recherche d’un jeu dans le salon.

Pour les vrais câlins, il faut attendre l’après-midi. A l’heure de la sieste, à défaut de se laisser attraper, elle se laisse caresser. Si Eglantine se repose dans sa chambre, Maya s’installe volontiers à ses côtés.

Les câlins les plus sincères restent ceux qu’elle partage avec Hortense le matin. Quand je vais la réveiller, Maya me suit infailliblement. Elle bondit sur le lit, le laboure consciencieusement en ronronnant et finit invariablement par s’installer contre la tête d’Hortense. Encore immergée dans son sommeil, Hortense peut alors passer son bras sur la petite chatte et glisser son nez dans la douce fourrure de Maya. Ses rêves se fondent dans le félin devenu peluche et la réalité d’une nouvelle journée prend forme au coeur des ronrons veloutés.

Hortense et Maya au réveil

Le réveil idéal pour une jeune fille qui aime tant les chats.

Maya n’est pas une abeille

La petite chatte Maya est arrivée chez nous voilà quelques jours. Joie de vivre et jeux permanents rythment sa vie.

Qui a baptisé Maya du nom d’une abeille rondelette et jouette aux rayures jaunes et noires ? Notre Maya est une petite chatte noire et blanche, aux oreilles et au museau roses et à la silhouette fine et allongée.

Elle est arrivée un samedi après-midi, en plein de confinement. Hortense et moi sommes allées la chercher avec une attestation spéciale fournie par l’association par laquelle nous sommes passés (Chat’bandonne pas 27). Nous cherchions un chaton qui serait plus câlin et joueur que Django et avec qui les filles seraient plus proches que notre gros grincheux.

Pour les caresses, c’est raté. Elle est tellement joueuse qu’elle ne supporte pas d’être prise dans les bras sans tenter de nous mordiller les doigts ou de nous enserrer les mains de ses longues pattes. Elle est tellement curieuse qu’elle s’échappe rapidement, coulant comme une goutte d’huile entre nos bras, rebondissant d’un bond flexible sur le sol avant de se précipiter sur un ennemi imaginaire, un jouet qui traîne ou ce pauvre Django.

Son humeur joyeuse, toujours égale, nous amuse énormément. Même Django s’est finalement laissé amadouer. Malgré les feulements et les coups de pattes, Maya revenait invariablement à la charge auprès de notre gros rouquin. Django est l’être vivant de la maison que Maya préfère. Elle recherche sa compagnie et pleure derrière les portes en attendant son retour quand il sort de la maison. Alors il la laisse faire, haussant parfois le ton quand elle est franchement agaçante, la cherchant lui aussi. Même si, ce qu’il préfère chez Maya, ce sont ses croquettes…

L’association nous a demandé de garder Maya à l’intérieur quelques mois. Mais la tâche est compliquée. Elle a tellement d’énergie et souhaite tant sortir dans le jardin ! Nous attendons qu’elle réponde mieux à son nom puis elle pourra explorer les sous-bois du jardin.

Alors, finalement, nous pouvons dire que Maya porte très bien son nom. Ecoutez-bien le générique de Maya l’abeille…

Vous avez bien entendu :

« Petite, oui, mais espiègle Maya !

Qui n’a vraiment peur de rien

Qui suit toujours son chemin »

Une description parfaite du caractère de la dernière arrivée chez nous.

Mais comment ne pas craquer devant ses grands yeux curieux, son ronronnement sonore, sa vivacité et la façon qu’elle a de se coucher sur le dos d’Hortense quand je vais réveiller ma collégienne le matin. Elle a aussi tenu compagnie à Eglantine dans son lit tout un après-midi. Des moments précieux.

Mission accomplie pour que les filles vivent une belle relation avec leur animal.