La lettre phare

Voilà une semaine qu’Hortense est partie en camp dans le sud-ouest. Chaque jour, je regarde la météo. J’avais chaud pour elle quand les prévisions tutoyaient les 40°. Je me raccrochais alors au vieil adage, « pas de nouvelle, bonne nouvelle ». J’avais raison puisque les chefs ont envoyé un message en fin de semaine pour rassurer les parents. Ils ont des arbres et avaient prévu des activités adaptées aux fortes chaleurs. Tout va bien

Nous n’avons plus l’habitude de ne pas avoir de nouvelles. Le moindre séjour dispose désormais d’un site sécurisé où découvrir les photos de la journée. Hortense, elle, est experte en l’art de ne pas apparaître sur les clichés. Lors de sa semaine de plongée à l’UCPA, on aurait pu croire qu’elle n’y avait jamais mis les pieds.

C’est devenu un jeu entre Olivier, Eglantine et moi. Où est Hortense ?

On la distingue parfois grâce à un vêtement. La plupart du temps, elle est invisible.

Et ravie de passer sous le radar des parents.

Les scouts sont un refuge. Pas de photos, pas de message (ou presque) pendant deux semaines. Hortense se retrouve dans sa bulle sous tente, éclairée de veillées joyeuses. Aux oubliettes les parents.

Elle n’emporte même pas une enveloppe et un timbre pour nous écrire pendant son séjour. Ils revenaient toujours froissés au fond du sac, exhalant une odeur de feu de bois.

Quand elle était plus jeune, je lui envoyais une carte postale chaque jour. Une année en primaire, elle était en classe transplantée dans les Alpes. Je lui avais même écris une histoire dont je postais chaque jour un chapitre. A son retour, elle ne l’avait pas lue.

Alors la tentation est forte de ne pas écrire. Mais les parents ne sont-ils pas là pour assurer une permanence, quoi qu’en pensent les enfants ? Un peu sur le modèle de cette histoire que je lisais aux filles quand elle étaient petites. Une maman renard rassure son petit à chaque page. Elle l’aime malgré les bêtises les plus énormes qu’il peut inventer.

Alors je continue d’écrire à Hortense quand elle part en camp. Une lettre par semaine. Pour lui montrer qu’on pense à elle, même si elle ne donne pas de nouvelles, même si elle est avec ses amis, même si grandir l’éloigne de nous.

Comme un phare dans la nuit, qui veille, qui indique une présence là-bas au loin, un point vers lequel se tourner en cas de problème.

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