Eglantine, Janis et la Grande Épicerie

Je ne pouvais pas terminer sur des mots tristes. Même si, les écrire, c’est se vider un peu la tête. Alors pirouette, cacahuète, un tour de passe-passe et je reviens sur une bonne raison de faire virevolter le quotidien.

Pour aller voir son médecin en plein cœur de Paris, Eglantine a choisi le vélo. Le temps est bon, le ciel est bleu, nous n’avons rien à faire que d’être heureux dit la chanson. Eglantine enfourche Janis, son fidèle destrier, pour affronter les affres de la circulation urbaine et le plaisir de l’air estival qui caresse la peau, de Paris qui défile au rythme du vélo, de sa liberté de mouvement, à peine entravée par quelques feux rouges qu’elle respecte scrupuleusement.

Depuis quatre ans qu’il la suit, le professeur a souvent changé d’adresse. Le voilà revenu à quelques pas du Bon Marché. Eglantine apprécie particulièrement les énormes cookies à la pistache de sa Grande Épicerie. Je l’imagine parfaitement déguster son choux à la crème à la pistache (plus de cookies pistache cet après-midi), assise à l’ombre des arbres du square voisin.

Image provenant du site lagrandeepicerie.com

Elle est revenue ravie de la ballade et de cette autonomie retrouvée que la douleur et la fatigue lui ont retiré ces dernières années.

Ce nœud à l’intérieur

Se lever le matin avec la crainte des nouvelles de la journée. Se coucher le soir en cherchant encore des solutions. Se rappeler de prendre de la distance. Depuis un an, j’ai découvert une facette sombre de ma maman. Une addiction, des dettes et une vie qui part en vrille.

Les pleurs, les appels à l’aide, les demandes incessantes, culpabilisantes. Le mensonge, le déni, le refus de prendre soin d’elle. Comment faire la différence entre comédie et maladie, manipulation et confusion ?

J’essaye, chaque fois, de la protéger, de créer autour d’elle une bulle protectrice, de répondre à ses attentes.

Elle réussit, chaque fois, à tout piétiner, à tout mettre en miette.

Parce qu’elle est malheureuse.

Parce qu’elle refuse de se soigner.

De prendre soin d’elle.

Et moi je vis avec ce nœud à l’intérieur, à tenter d’endiguer le désastre.

Impuissante.

Exténuée.

Vidée.