Il y a dix-huit ans, tu venais de naître au Portugal. Nous passions notre première nuit ensemble et je me réveillais au moindre de tes bruits. Chacun de tes pleurs m’interpellait. Je ne les comprenais pas. Finalement, une infirmière, très gentille mais un peu lasse de mes interrogations incessantes, m’avait dit : « Vous savez, les pleurs, c’est le seul mode d’expression des bébés. Ca ne signifie pas forcément qu’ils ont besoin de quelque chose. »
Moi, je te prenais dans mes bras tout le temps. Je te portais dans une écharpe. Sur le ventre, sur le dos. Je te berçais sans cesse.
Puis, tu as appris les mots, avec ta petite voix fluette, des mots français et d’autres portugais. « E meu !» jetais-tu sans équivoque à un autre enfant qui tentait de te prendre un jouet. Des mots qui tintinnabulaient en d’incessantes questions pour comprendre pourquoi le monde était ainsi.
Tu as changé de pays et appris de nouvelles langues… que tu as outrageusement rangées dans un tiroir de ta mémoire à ton arrivée en France.
Désormais, tu as vécu aussi longtemps en France qu’à l’étranger.
Tu continues à te poser autant de questions. Les sciences et la philosophie sont tes caisses de résonance. Malgré les douleurs passées et cette fatigue toujours palpable, tu avances sur la route que tu te composes chaque jour au gré de ton état et de tes envies. Avec toi, nous découvrons les chemins de traverse, ceux qui se révèlent en écartant les hautes herbes, repoussant quelques ronces piquantes. Ce genre de sentiers caillouteux au bord desquels tu aimes cueillir les plantes sauvages.
Jeune fille. Jeune femme.
Toujours ta voix fluette pour une réflexion bien affûtée.
Et cette joie de vivre qui ne t’abandonne jamais. Cette soif de découverte. Ce plaisir des sensations fortes qui te fait tant aimer skier sur un glacier ou voler en parapente. Toute cette ardeur que ta fatigue chronique n’a jamais réussi à éteindre et qui nous impressionne quotidiennement.
Dix-huit ans, la majorité. Qu’est-ce que la majorité si ce n’est la plus grande partie de ta vie à venir ? Avec ses libertés et ses responsabilités, avec ses joies et ses peines. Et avec notre soutien, toujours, quelles que soient tes décisions ou tes indécisions. Pour que tu diriges ta vie aussi bien que ton parapente, en toute liberté.
Bon vent ma tendre, ma belle, indépendante et responsable majeure. Et bon anniversaire !
