Le platitude de La vie heureuse

On ne peut pas rater la sortie du dernier livre de David Foenkinos, La vie heureuse. Émissions de télé, radio, encarts publicitaires dans la presse, affiches dans la rue. Son titre sonne comme un mantra de développement personnel, un appel au bonheur dans une période morose.

Si j’y ai retrouvé son art du récit délicat, les incertitudes touchantes des personnages et une approche inattendue de nos quotidiens modernes, je n’ai pas été embarquée par le roman. J’ai gardée une certaine distance tout au long de la lecture. Comme lorsqu’on retrouve une ancienne connaissance et qu’on s’aperçoit que la conversation ne décolle pas. On sait déjà qu’à la fin de celle-ci, on ne se reverra plus.

Pourtant, Eric et Amélie, les personnages principaux du livre, sont attachants. Pétris des travers de notre société, moulés dans ses attendus, leurs vies se fissurent lentement, de renoncements en acceptations dociles. Jusqu’au grand bouleversement, la rencontre avec la mort. Pas n’importe laquelle puisqu’il s’agit de sa propre mort.

Ecrire son épitaphe, se retrouver dans son propre cercueil, faire face à sa propre finitude. Tout le monde semble trouver cela normal. Les bénéfices de l’expérience ne sont jamais remis en question. L’enthousiasme général, unanime, retire toute force et tout éclat à l’idée.

De même, les ruptures feutrées, les sentiments contrôlés, les mots pesés confèrent à l’ensemble une atmosphère anesthésiée. Alors que les trahisons plus ou moins volontaires, les méprises et les contre-temps savamment distillés devraient donner du relief au récit, l’ensemble est finalement assez plat, manquant de force et d’entrain.

L’histoire de La vie heureuse, est celle d’Eric et Amélie. Anciens camarades de lycée, ils se retrouvent à l’aube de leurs quarante ans grâce aux réseaux sociaux. Lui, cadre chez Décathlon n’est plus tellement « A fond la forme ». Elle, à la pointe de la start-up nation jupitérienne, semble increvable. Le roman n’oublie aucun stéréotype de nos sociétés modernes.

J’ai trop senti l’auteur me prendre la main pour m’emmener dans son nouvel univers – avec toujours cette attirance récurrente pour le monde de la culture et des musées. J’aurais préféré être portée par l’histoire au point de lâcher prise. Au moins ai-je passé un bon moment.